2020-01-05

Les paroissiens de Pâquier


L’église de Pâquiers* est remplie de ses paroissiens. Le village presque tout entier a tenu à être présent. Les parents, les alliés, tous sont venus. Je ne suis pas sûre de reconnaître les Falcouz, Pollin, Garipel, Garipel Blachet, Izoard, Izoard Rey, Recolin, Recolin Blardon   Certains  font partie de notre famille, d’autres assistent en voisins, en amis.
Cette basilique romane a sans doute été le témoin d’innombrables événements familiaux depuis le XIIe siècle.


Tandis que les femmes se serrent sur les bancs, plusieurs hommes restent debout au fond de leur église paroissiale, guère plus grande qu’une chapelle, laquelle peine à contenir toute l’assistance.

Lorsqu’Antoinette entre avec une lenteur solennelle, l’émotion est tangible, les yeux se troublent, les mouchoirs s’agitent discrètement pour sécher quelques larmes.
Une faible lumière pénètre par les fenêtres, le froid pique, en ce quatorzième jour de février de l’année 1785.
De chaque côté de la nef, les trois piliers carrés supportent les voûtes en ogive qui font résonner les chants des femmes, soutenus par les voix graves des hommes.

Puis le silence s’installe. La porte est restée entrouverte, on est étonné de constater que le village paraît inhabituellement calme en ce jour.   


À présent, tous les participants de la cérémonie se tournent vers le curé officiant devant l’autel, sous la voûte en coquille. Il apprécie Antoinette et il le dit haut et fort.

Des regards furtifs se dirigent vers le premier rang où se serrent Noël Falcouz et ses deux fils Etienne et François Noël, deux gaillards de vingt-quatre et quinze ans. Ils n’ont pas compris comment les heures ont pu s’écouler depuis avant-hier soir ; pour eux, le temps s’est arrêté.

Le curé Jolly prononce cet hommage à Antoinette : " regrettée de tout le monde. Elle s’est attiré l’estime par sa douceur et ses autres vertus. Mais surtout par sa générosité envers les pauvres."


Le quatorze dudit mois et an (février 1785) j'ai inhumé Antoinette Pollin, femme de Sr Noël Falque, décédée avant-hier soir, munie des sacrements, âgée d'env[iron] 50 ans. Ont assisté à ses obsèques presque toute la paroisse, étant regrettée de tout le monde dont elle s'est attiré l'estime par sa douceur et ses autres vertus, mais surtout par sa générosité envers les pauvres.
Signatures: Ennemond Pollin, Antoine Pollin, (frères d'Antoinette) et Hugue Sauze 



Samedi dernier, la terre était encore gelée dans ces montagnes de Lans, mais ce lundi on a pu creuser la tombe à l’extérieur de l’église, dans le cimetière où reposent nos aïeux.

Dans quelques semaines, le printemps fera fleurir la végétation autour des croix plantées dans l’herbe. 

Antoinette Pollin (sosa 241) a été baptisée ici, le 22 juin 1733.
Elle s’est mariée dans cette église, il y a 263 ans, le 26 janvier 1757. 
Vous connaissez déjà son époux (sosa 240) : il s’appelle Noël.
Vous retrouverez prochainement son fils François Noël (sosa120), celui qui est venu habiter à Lyon.


Bibliographie
Guide du voyageur dans le département de l'Isère (XIXe siècle) sur Gallica

Iconographie
Chapelle Saint-Christophe de Pâquier

* Pâquier, Pasquiers ou Pâquiers, dépend de Saint-Martin-de-la-Cluze en Isère. (voir la carte en lien ci-dessous)

6 commentaires:

  1. Rare mention du prêtre et combien précieuse, émotion à la découvrir j'imagine.

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    1. Mais oui, il est trop bien ce curé !
      Il va m'inspirer d'autres histoires à raconter.

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  2. Quelle belle découverte, malgré cette triste circonstance. Il est rare de trouver de telles mentions. Cette dame devait être réellement douce, généreuse et aimée de ses amis.

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  3. Je découvre avec un peu de retard ton joli texte plein d'émotions, bravo !

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  4. quel bel hommage rendu à cette femme par le prêtre, et par toi via ce billet, 235 ans après...

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